Claude oublie sa mucoviscidose dans la vigne

Publié le par Pascal

Elle l'a appris très tard, à 34 ans. Déjà maman et sportive de toujours, « je n'ai pas été surprise ». Onze ans plus tard, Claude Palet affiche une ligne impeccable de marathonienne, à force de courir entre la cave particulière qu'elle exploite à Montbazin avec sa sœur Lise, "Le chant des filles", les hôtels-restaurants où officie sa fille de 19 ans, ses amis.... « Je bouge tout le temps, les gens ne se rendent pas compte que je suis malade. » Pour le sport, Claude Palet a dû arrêter récemment la course à pied, la piscine, le vélo... Les effets de la mucoviscidose. L'espérance de vie ne dépasse pas 40 ans.

« Je suis née en 1960, mon frère en 63, ma sœur en 64. Mon frère est mort bébé, on ne parlait pas de la mucoviscidose à ce moment-là. J'ai toujours eu des problèmes respiratoires, soignée pour des sinusites, des surinfections... puis je n'ai plus voulu voir personne. » Jusqu'au diagnostic posé par Jean-Louis Pujol, au CHU. Depuis, il y a aérosols et kiné tous les jours. L'inquiétude des proches, « un papa poule, une maman poule », la fille, le mari, dans « une famille très unie », sa « tribu » : « Ne fais pas ci, pas ça... La dernière fois qu'on s'est disputé avec ma sœur, c'est parce qu'elle voulait m'accompagner en voiture à l'hôpital. »

C'est avec elle, Lise, que Claude Palet a repris il y a trois ans la propriété familiale de 16 ha. Tout le raisin était alors livré à la coopérative. « On a commencé à vinifier 1,3 ha de viognier en vendanges tardives. On a acheté deux cuves, monté un petit caveau de dégustation... » Le blanc, le rosé, le rouge cette année ont suivi, commercialisés sous l'étiquette Le Chant des filles, en écho à la première parcelle de viognier, le champ des filles. Elles continuent à porter 1 000 hectos à la coopérative. Chez les restaurateurs, Le Petit Jardin, à Montpellier, Le Pet au diable, aux Matelles, Chez François, à Sète, ont été séduits. Sur place, les dégustations lancées cet été « ont bien marché », il y en avait encore une vendredi dernier, autour d'une poêlée de châtaignes.

« On ne connaissait pas le travail à la cave, la vinification était un mystère, c'est un exploit », confie la néo-vigneronne, qui a longtemps accumulé les « petits boulots » : « J'ai tenu la caisse locale de Groupama, j'ai été secrétaire chez un dentiste, assistante maternelle... » Un exploit humain, économique aussi : « En un an, nos revenus mensuels sont passés de 3 000 € à 2 000 €. On essaie de ne pas se décourager. Mais une crise comme ça, pour les jeunes, c'est l'horreur. » Claude Palet ne chasse qu'un temps son immuable sourire de bonne vivante.

« J'aime manger, boire, voir du monde... » Là, elle imagine comment elle aménagera des chambres d'hôtes sur un étage de la maison de famille, elle fait des plans, pense la décoration. « Finalement, la maladie m'oblige à m'arrêter. » Cette maladie qui met désormais du plomb à ses chaussures de ski, elle est heureuse de l'avoir connue si tard : « Si mes parents l'avaient su plus tôt, qu'est-ce qu'ils auraient fait ? On aurait aspiré l'embryon ? Le matin, quand je me lève, que je respire, c'est tellement bon... J'aimerais que tout le monde profite de la vie autant que moi. J'ai fait tout ce que je souhaitais faire, je me suis adaptée. »

Source : Midi Libre Hérault du 28.11.2005

Publié dans l'info minute

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